À première vue, le temple Nyoirinji pourrait passer inaperçu dans la petite ville tranquille d’Ogori, à l’écart des grands circuits touristiques. Et pourtant, ce lieu discret cache une histoire presque millénaire, liée à une figure importante du bouddhisme japonais et à une statue mystérieuse rarement visible du public.
Quelle est l’histoire du temple et de sa statue sacrée ?
Fondation par le moine Gyôki
Le temple fut fondé en 729 par le moine Gyôki, une figure spirituelle majeure de l’époque de Nara. Grand prédicateur et bâtisseur, Gyôki fut aussi un pionnier dans l’accès au bouddhisme pour les populations rurales. C’est dans ce cadre qu’il aurait sculpté, à la main, une statue en bois représentant Nyoirin Kannon (如意輪観音), l’une des formes les plus vénérées de la déesse de la miséricorde.
La statue de Nyoirin Kannon
Cette statue est unique : elle a été taillée dans un seul tronc d’arbre et possède six bras, chacun tenant un symbole bouddhique fort. On y trouve notamment une perle exauçant les vœux, une roue du Dharma (Dharmachakra) et d’autres attributs spirituels. Habituellement cachée à la vue des visiteurs, cette sculpture précieuse n’est dévoilée au public qu’une fois tous les 12 ans. Une tradition qui suscite la ferveur des fidèles et attise la curiosité des visiteurs de passage.
Reconstruction et rôle actuel du temple
L’histoire de Nyoirinji n’est pas sans épreuves. En 1586, le temple fut ravagé par un incendie pendant une période de guerre. Il fallut attendre le début du XVIIe siècle pour qu’Arima Tadayori, seigneur féodal du domaine de Kurume, en ordonne la reconstruction. Depuis, le site est resté un lieu de culte actif. Aujourd’hui encore, il attire plus de 30 000 visiteurs par an, fascinés par son atmosphère paisible… et son étonnante population de grenouilles.
Pourquoi le temple est-il rempli de grenouilles ?
Au Japon, les temples sont souvent associés à des divinités, des traditions locales ou des objets de culte bien spécifiques. Mais rares sont ceux qui peuvent se vanter d’abriter une armée entière de grenouilles. Et pourtant, le surnom de Nyoirinji ("le temple des grenouilles"" n’a rien d’ironique : on y trouve plus de 5 000 représentations de ces batraciens !
Origine de la collection
Tout commence dans les années 1990, lorsqu’un grand prêtre du temple part en voyage en Chine. Il revient avec quelques figurines de grenouilles en jade, séduits par leur aspect porte-bonheur. Peu à peu, la collection prend de l’ampleur. Les fidèles, amusés et inspirés par l’idée, commencent à offrir eux aussi leurs propres grenouilles au temple. Résultat : aujourd’hui, le site est littéralement peuplé de ces créatures, allant de minuscules sculptures à des statues grandeur nature.
Jeu de mots et symbolique spirituelle
Mais pourquoi des grenouilles, précisément ? En japonais, le mot "grenouille" se dit kaeru (カエル), qui est aussi la prononciation du verbe "rentrer" ou "revenir" (帰る). Ce jeu de mots a une valeur symbolique puissante : il évoque le retour sain et sauf à la maison, mais aussi le retour à soi, à ses origines ou à un état d’équilibre spirituel.
Une collection vivante et évolutive
Aujourd’hui, le temple n’est pas seulement un lieu de recueillement, mais aussi un véritable musée à ciel ouvert dédié à la grenouille. Chaque recoin réserve une surprise : une grenouille en train de prier, une autre jouant de la flûte ou encore des scènes entières humoristiques ou poétiques. Les visiteurs s’amusent à toutes les repérer, un peu comme dans une chasse au trésor silencieuse. Et chaque année, de nouvelles grenouilles viennent s’ajouter à la collection.
Que découvre-t-on en visitant le temple ?
Le temple Nyoirinji n’est pas un immense complexe monumental. C’est plutôt un lieu à taille humaine, propice à l’exploration tranquille et à la contemplation. On y vient sans se presser, prêt à se laisser surprendre par les détails.
Ambiance et expérience sur place
Dès l’entrée, une grande statue de grenouille vous accueille. L’ambiance est à la fois légère et respectueuse : on sent que l’humour et la spiritualité cohabitent ici sans jamais se gêner. Le silence du lieu est souvent rompu par les clochettes suspendues qui tintent au gré du vent, notamment en été, lors du festival des fūrin (風鈴).
Jardin, recoins et objets insolites
Le jardin du temple est agréable, avec un petit étang, quelques érables et des bancs pour s’asseoir et observer. On peut y voir aussi un petit sanctuaire dédié aux vœux, où l’on dépose ses prières sous forme de plaquettes en bois (ema)… souvent en forme de grenouille, bien entendu. Le site regorge de recoins à explorer, ce qui en fait une visite idéale pour ceux qui aiment les lieux à double lecture : visuelle et symbolique.
Quels sont les événements annuels du temple Nyorin-ji ?
Le temple a plusieurs événements dans l'année.
- 1er janvier : prière du jour de l’an
- 17 janvier : Premier grand festival de Kannon (la traversée du feu)
- 11 février : Setsubun, fête du printemps
- 24 avril : Grande fête du bodhisattvas Jizô
- 17 juillet : prière de l’été
- 24 août : rituel Abhiseka (confirmation des étudiants bouddhistes pour passer à un niveau supérieur de pratique)
Comment y accéder depuis Fukuoka ?
Visiter le temple Nyoirinji ne demande pas une logistique compliquée, mais quelques conseils pratiques peuvent rendre l’expérience encore plus agréable.
Depuis le centre de Fukuoka, il faut prendre la ligne "Nishitetsu Tenjin-Ômuta" jusqu’à la station Mitsusawa (三沢駅). Le trajet dure environ 50 minutes. De la gare, le temple se trouve à une quinzaine de minutes à pied. Une balade agréable à travers un quartier résidentiel calme.
Evitez les heures de pointe du matin ou du soir, car la ligne est aussi utilisée par les locaux pour se rendre au travail.
